Comparaison Pragmatique...

Présentation de l'auteur

Armand Jukley-Wernh est un homme politique et ancien militaire sthanor. Il est, à l'époque de l'écriture de cet essai, Lieutenant-Colonel de la NSW, Ministre Consulaire de l'Intérieur d'Ekrent Prynzhev et Président du Parti Libéral-Réformiste.

TEXTE

Dans cet essai, nous tenterons d'examiner et de comparer les régimes et idéologies du Monde, sans juger leurs fondements mais leur efficacité.

Un régime, une idéologie est considérée efficace quand il/elle garantit: l'intégrité d'une Nation et la cohésion de ses citoyens, le maintien d'une croissance économique et d'un développement humain et technologique durables et de façon complètement autonome, ainsi que la cohérence de ses jugements et actions.

La première distinction que l'on peut faire est celle du fonctionnement même des régimes, démocratiques ou dictatoriaux: dans un cas, ils prennent les opportunités et émettent des jugements au fur et à mesure, menant une sorte de Realpolitik: il s'agit du Wolfangilia, du Gleipnir, de la République de Cloudth, et des pays ruritano-poldaves. Leurs buts et leurs programmes, tout divers qu'ils soient, sont reliés par l'absence d'adhésion forte à une idéologie particulière.

Nous allons plutôt nous intéresser aux régimes, démocratiques ou non, qui se déclarent rattachés à une idéologie particulière et s'y tiennent quoi qu'il arrive.
D'une manière générale, on peut distinguer quatre grandes familles idéologiques: communiste, angéliste, démocratique, et un groupe moins uni, que l'on peut qualifier de nationalistique.

Groupe communiste

Inspiré par des doctrines énoncées au XIXème siècle en réponse au paupérisme massif dans les nations industrialisées, il a pour principales caractéristiques la propriété universellement publique et la recherche de l'égalité sociale. On peut le découper en deux catégories: le communisme dans sa définition généralement admise, qui préconise de faire fonctionner une société aussi technologique que celles existant dans les régimes libéraux: c'est le cas de la République des Travailleurs et de l'Elghinn, et le collectivisme de communes, qui rejette la technologie au nom de l'environnement et requiert que tous les humains vivent dans des communautés autonomes et peu unies.

Si, sur le papier, le communisme est censé garantir le bonheur par l'égalité, il a les défauts de ses qualités: puisqu'il préconise de traiter tout le monde de la même façon, seuls les individus ayant une conscience de l'intérêt commun particulièrement aiguë peuvent ressentir le besoin de se dépasser et d'inventer, ce que fait naturellement toute personne dans un système capitaliste, puisqu'elle peut compter sur une rétribution de la part du marché. De la même façon, les économies planifiées, ne fût-ce que partiellement, ont énormément de mal à être aussi efficaces et adaptatives que le sont naturellement les économies de libre-échange.
Ensuite, dans les faits, il se créé presque systématiquement une bureaucratie, souvent composée des "révolutionnaires" de la première heure dont les convictions et le mode de vie ont été adoucis par les faveurs dûs à leur condition, ce qui pousse de nouveaux révolutionnaires au sein même de leur Parti à les expulser et à devenir eux-mêmes bureaucrates, ce qui fait recommencer le cycle ad vitam aeternam et empêche une politique constante et durable, car, trop souvent, les "nouveaux" se revendiquent d'une autre variante (marxisme-léninisme, stalinisme, trotskyisme, maoïsme…) et font des changements, mineurs dans la revendication idéologique du pays concerné, mais assez significatifs pour désorienter.

Le collectivisme de communes, basé sur l'idéal d'une vie simple et paysanne au sein de petites "communes" éparpillées dans la campagne, présente deux inconvénients de taille: premièrement, il empêche les progrès technologiques dûs aux machines de se répandre rapidement (et le pays concerné est considéré comme faible par ses voisins industrialisés); deuxièmement, il s'adresse principalement aux habitants de pays pauvres vivant déjà de la même façon, les habitants de pays déjà riches acceptant rarement de revenir à un mode de vie rural quand leur famille a quitté son village d'origine il y a trois ou quatre générations.

Groupe angéliste

Construite sur la base des préceptes de Simon Ange, de qui elle tire son nom premier (angisme), l'idéologie angéliste revendique ouvertement (du moins dans ses textes fondateurs) qu'elle a comme but de contrôler les "masses décérebrées" afin de les soumettre à la volonté d'un Etat supranational et tout-puissant. Il s'agit donc forcément d'un régime violent et répressif, utilisant volontiers la propagande sur le territoire national, et encourageant fréquemment les mouvements dits favorables à l'idéologie mais confondant leurs propres intérêts avec ceux des pays angélistes, en premier lieu son foyer historique l'Iron Mind.
En se répandant aux Sthans par le biais de Werno Dolmanov puis de Stundhol Steganapossiev, l'angélisme a trouvé aux Sthans un terreau très différent de celui dont il profitait en Amerzone; ensuite, alors que l'Etat Libre de Flakgrad en faisait sa doctrine d'Etat, ses idéologues n'ont pas hésité à en modifier ou supprimer certaines parties (notamment celle sur l'Etat supranational) pour mieux la faire correspondre à ses besoins propres, si bien qu'il est difficile de relier les variantes mindienne et sthanore autrement que par leur parenté.

Le système angéliste a pour inconvénient majeur son intolérance même: une partie des savants et intellectuels sont emportés pour "raisons politiques" et remplacés par des incapables, ce qui empêche parfois les nations angélistes d'être autant à la pointe des nations qu'elles le souhaiteraient.

Groupe démocratique

Ce groupe assez disparat n'est relié, sur le fond, que par une seule chose: la défense à tout prix des libertés individuelles et politiques (souvent aussi celles d'entreprendre). On peut facilement distinguer trois types majeurs: alderaan, janakaan, sthanor.

Le type alderaan est, comme son nom l'indique, caractéristique de l'Empire d'Alderande: le débat politique est somme toute réservé aux diplômés de politologie ou d'administration publiques, qui considèrent bien souvent les politiques hors de leur caste comme extrémistes et populistes. L'Etat dispose d'un contrôle faible, mais tangible, sur les libertés individuelles et les entreprises, les élites de la société étant divisées entre le monde du commerce et celui de l'administration. Interventionnistes seulement à leur convenance, les dirigeants prennent rarement une position extrême, ce qui incite (dans le cas de l'Alderande) une bonne partie des nations démocratiques (surtout celles adhérant intrinsèquement à une Realpolitik) à se rallier à ses actions en général légitimées par l'ONU.
Ce système a également les défauts de ses qualités: sa modération l'empêche d'agir fermement et rapidement, tandis que le système politique lourd empêche parfois des adaptations rapides, ce qui peut être extrêmement dommageable en cas de crise sérieuse.

Le type janakaan est plus intermédiaire, se revendiquant de principes démocratiques tout en étant en général très désintéressé, bien que l'on sente quelquefois un intérêt pris par les élites et les corporations du pays, notamment en Amerzone quand elles défendent la "stabilité" au profit de leurs propres implications dans ce continent. Moins de cloisonnement dans la caste politique, mais la noblesse joue un rôle important à cause de la présence d'un monarque. Ce système démocratique est donc assez modéré et donc accepté par la majeure partie des régimes du Monde, mais pour les mêmes raisons que le type alderaan, il peut rarement prendre position fermement.

La démocratie sthanore, quant à elle, est dirigée par le biais d'une caste militaro-politique, imposant un cloisonnement moins imperméable que celui réalisé par les écoles d'administration publique (il arrive occasionellement qu'un homo novus complètement inconnu accède à de hautes fonctions). Un autre cloisonnement moins sévère est celui réalisé par les Grandes Familles (au nombre de dix) et les familles nobles, une petite trentaine. La protection sociale est relativement effective, mais le libéralisme quasi-total accordé à l'économie n'empêche absolument pas les disparités d'être énormes entre le travailleur de base et le grand patron (plus de 700 fois dans certains cas).
Ensuite, les prises de position sont souvent faites par le cercle restreint des dirigeants militaires du moment, ce qui fait qu'elles sont défendues avec la même brutalité qu'elles soient bonnes ou mauvaises, tandis que le "Chef Suprême" bénéficie d'une notoriété si écrasante qu'il est rarement contredit, et jouit même d'un culte de la personnalité comme cela a été le cas avec le Maréchal Flak V.

Groupe nationalistique

Il convient de distinguer le nationalisme "de base" (faute d'une meilleure expression), employé de temps à autre dans les régimes de Catégorie I, et le National-Républicanisme qui est l'idéologie officiellement reconnue de la République Armée Eduens, du Casimirstan, et de la République Armée Flakgradie. La Transweschstrie-Sthane est un cas un peu plus particulier, étant proche du Casimirstan mais se voulant principalement neutre. Soudé par une organisation unique (le Conseil d'Amitié, de Coopération et d'Assistance Mutuelle, ou CACAM) et par une idéologie commune, il forme un groupe de nations moyennement puissantes, mais possédant un siège au Conseil de Sécurité des Nations Unies proposées par Ozarent Klent.

L'idéologie Nationale-Républicaine, et son double National-Unioniste aux Sthans, repose sur le mépris des monarques et une vue de la société qui se rapproche de l'universalisme développé par certains penseurs au début du XXème siècle, c'est-à-dire le remplacement des coutumes et des ethnies par celles définies par l'Etat et pour la cohésion nationale: les citoyens appartiennent d'abord et avant tout à leur Nation, bien plus qu'à leur région ou à leur ethnie, contrairement à ce qui se passe ailleurs dans le Monde. Cette cohésion exceptionnelle a le prix de créér un fort mécontentement parmi ceux qui se sentent plus attachés à leur région (avec les conséquences que l'on sait au Khamnyarstan) et une haine intrinsèque envers les communistes, par nature internationalistes, laquelle est souvent relayée par l'Etat et l'Armée.

Conclusion

On peut conclure qu'aucun de ces différents régimes n'est en passe de surclasser durablement les autres, à cause de leur nature même: le communisme se préoccupe trop de l'égalité, l'angélisme du contrôle de la population, la démocratie des libertés individuelles et entrepreneuriales, et le nationalisme républicain de la cohésion nationale et de l'armée. La seule solution viable pour un progrès constant et soutenu serait un régime regroupant tous les avantages de ces différentes idéologies: égal comme le communisme, ferme comme l'angélisme, libéral et rétribuant le mérite individuel comme la démocratie, cohérent comme le nationalisme républicain. Mais un tel régime serait, justement, incohérent…

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